Deuxième partie d'une série d'articles sur la négociation:
Les formes de la négociation
Préparer une négociation: la phase amont
Choisir une stratégie de négociation
Rôles et tactiques au cours d'une négociation
La conduite d'une négociation
Avertissements:
- La négociation est ici évoquée comme technique professionnelle dans un contexte d'achat/vente ou de discussion entre professionnels. Par souci de clarté, il arrive nous citions des cas tirés de la vie quotidienne: négociation sur le prix d'un logement, candidature de recrutement, discussion familiale. Il conviendra donc de faire la part des choses: si l'on négocie dans la vie de tous les jours (et parfois sur des enjeux importants), il est évidemment malsain d'utiliser un stratagème déloyal pour obtenir d'un enfant qu'il se couche, ou d'un ami qu'il vous prête sa voiture. A l'inverse, seule une minorité songerait à critiquer la vieille tactique du bon et du méchant si elle permet d'obtenir les aveux d'un criminel avéré. Les outils sont... les outils, c'est à dire ni bons, ni mauvais intrinsèquement. C'est leur finalité peut faire l'objet d'une critique morale.
- Bien sûr, la meilleure des négociations est fondée sur la sincérité et la recherche d'une solution gagnante pour toutes les parties... Malheureusement, dans ce monde imparfait sincérité et positivisme ne sont pas toujours suffisants. Il arrive aussi - pas si rarement, en fait - que votre vis-à-vis ne partage pas votre bonne volonté. C'est pourquoi il me paraît utile d'étudier la négociation sous toutes ses formes, les plus nobles comme les plus laides.
- Pour illustrer le propos sont régulièrement cités des passages de 'Saint Germain ou la négociation' de F. Walder.
Les formes de la négociation
Préparer une négociation: la phase amont
Choisir une stratégie de négociation
Rôles et tactiques au cours d'une négociation
La conduite d'une négociation
Avertissements:
- La négociation est ici évoquée comme technique professionnelle dans un contexte d'achat/vente ou de discussion entre professionnels. Par souci de clarté, il arrive nous citions des cas tirés de la vie quotidienne: négociation sur le prix d'un logement, candidature de recrutement, discussion familiale. Il conviendra donc de faire la part des choses: si l'on négocie dans la vie de tous les jours (et parfois sur des enjeux importants), il est évidemment malsain d'utiliser un stratagème déloyal pour obtenir d'un enfant qu'il se couche, ou d'un ami qu'il vous prête sa voiture. A l'inverse, seule une minorité songerait à critiquer la vieille tactique du bon et du méchant si elle permet d'obtenir les aveux d'un criminel avéré. Les outils sont... les outils, c'est à dire ni bons, ni mauvais intrinsèquement. C'est leur finalité peut faire l'objet d'une critique morale.
- Bien sûr, la meilleure des négociations est fondée sur la sincérité et la recherche d'une solution gagnante pour toutes les parties... Malheureusement, dans ce monde imparfait sincérité et positivisme ne sont pas toujours suffisants. Il arrive aussi - pas si rarement, en fait - que votre vis-à-vis ne partage pas votre bonne volonté. C'est pourquoi il me paraît utile d'étudier la négociation sous toutes ses formes, les plus nobles comme les plus laides.
- Pour illustrer le propos sont régulièrement cités des passages de 'Saint Germain ou la négociation' de F. Walder.
Certains négociateurs clament haut et fort que tout repose
sur le talent, l’art de l’improvisation, le génie du moment. Belles paroles.
Talleyrand, grand diplomate s’il en fut [1],
écrivait que « L’esprit sert à tout, mais il ne mène à rien ».
La préparation de la négociation conditionne sa réussite. Il importe notamment
de parfaitement connaître le dossier et la partie adverse, d’établir une
stratégie – tout en sachant qu’elle devra probablement évoluer en cours de
route -, de mobiliser son équipe, et enfin de créer les conditions du succès.
Recueillir les informations du dossier
Une négociation repose sur des arguments, qui s’appuient
eux-mêmes sur des faits objectifs. La méconnaissance des faits du dossier
conduit à un discours creux qui se dégonflera comme une baudruche à la première
objection de la partie adverse. « Je veux une augmentation de 3% » -
« Pourquoi ? » - « Eh bien, j’ai discuté avec mes
collègues, tout le monde a été augmenté de 3% cette année » - « Pas
du tout, j’ai les éléments sous les yeux. Regardons ensemble :
l’augmentation moyenne n’est que de 1,2%, et dans votre catégorie de salaire la
plus élevée n’atteint que 2,5%. Je vous propose donc de discuter sur ces
bases ». Dans un débat de quelque nature que ce soit, la crédibilité des
arguments s’appuie sur la précision des faits et chiffres annoncés, et la
preuve qu’on peut en donner.
Faut-il pour autant mener une enquête précise, voire
embaucher une société spécialisée, pour se mettre dans les meilleures
conditions ? Tout dépend de l'enjeu, et des budgets. Dans
une table ronde internationale, les dirigeants s’entourent de conseillers
grassement rémunérés et font appel à des cabinets d’étude réputés. Cette
débauche de moyens ne sera pas utile pour obtenir d’un magasin de meubles une
remise sur une table de chevet.
Il est souhaitable de ne retenir que les informations
précises et fiables, quelque envie qu’on ait de présenter à son mandataire une
somme épaisse de documents qui justifie les heures de préparation. Une fausse
information, voire une information inutile, sera toujours plus préjudiciable
que l’absence d’information. D’autre part, la perception que l’on a d’une
information tient beaucoup à la position depuis laquelle on l’observe. Ainsi,
dans un débat entre locataire et propriétaire d’un appartement, le prix du bail
peut paraître élevé à l’un en regard de ses moyens limités, et faible à l’autre
qui le compare aux prix du quartier. Préparer une négociation demande à faire
preuve d’une profonde et sincère empathie, à se mettre à la place de l’autre
pour comprendre son point de vue.
Ce qui ne veut pas dire l’admettre.
Connaître la partie adverse
« Je me tourne vers l’autre parti, je me façonne selon
sa condition, je me moule sur sa destinée, et vivant à sa place, je me mets à
éprouver ses biens et ses maux. Dès lors j’ai moins souci de lui imposer ma
façon de voir que de le convaincre d’adopter celle que j’espère la meilleure
pour lui – et qui toujours s’accorde avec les intérêts de ma cause » [2].
Voici une liste non exhaustive de points à renseigner.
-
La négociation porte sur un objet. Le décrire
dans le détail. S’assurer que l’on n’a rien oublié.
-
L’enjeu : quel est-il, pour nous et pour
eux ?
-
La partie adverse : nos adversaires
sont-ils des négociateurs expérimentés ? Y a-t-il divergence d’opinion
dans leur équipe ? Quel est leur niveau d’information sur le sujet de la
négociation ? Quel est leur pouvoir de négociation ? Quel est leur
timing de décision ? Ont-ils une raison particulière de régler rapidement
le problème ? Ne pas oublier qu’ils peuvent prendre plusieurs
décisions : non, oui, plus tard, peut-être, ne sais pas…
Pour récupérer ces informations, consulter :
-
Les documents émis de part et d’autre avant la
négociation, qui sont à relire attentivement, qu’ils soient ou non de nature
contractuelle.
-
Les moteurs de recherche sur Internet, les outils de veille sociale et de monitoring de réputation.
- Nos amis et relations communes aux deux parties,
qui peuvent utilement nous renseigner. Ne pas oublier que tel détail qui nous
apparaît comme insignifiant au début de la négociation peut s’avérer décisif
par la suite.
-
Si besoin, des cabinets d’étude. Il en existe
plusieurs sortes et ce métier se développe rapidement à mesure que les
relations se complexifient (internationalisation, surabondance d’informations
sur le web…). Il est ainsi arrivé à Horus Management,
société spécialisée dans la veille opérationnelle, de prédire l’échec d’une
stratégie industrielle par l’analyse des profils qui composaient le corps
dirigeant.
-
Demander ! Ne pas hésiter à poser des
questions à « ceux d’en face ». Sonder les motivations profondes de
chacun avec la question « Pourquoi pas ? ». Les motivations
profondes d’un acteur sont liées aux 5 exigences fondamentales suivantes :
*
Sécurité
*
Bien-être économique
*
Appartenance à une communauté
*
Identification
*
Maîtrise de son destin
Mais le must est d’avoir un champion dans la place. On entend par
champion une personne qui participe au processus de négociation dans les rangs
adverses, et qui est rallié à notre cause. Si le champion est caché (ses
motivations restent inconnues de ses collègues), c’est l’arme fatale. Grâce à
lui on connaît les enjeux, les stratégies, les prochains mouvements…
Un champion peut se trouver par chance. On peut aussi tâcher
de le fabriquer. Ainsi le seigneur de Mélynes, du camp des Huguenots[3],
fait-il intervenir Mademoiselle de Mesmes dans les débats. Celle-ci est de la
famille de l’un des représentants du roi ; mais elle est en même temps
huguenote déclarée et travaille activement à sa cause. Plus prosaïquement, on
verra ci-dessous qu’il est souhaitable d’entretenir de bonnes relations avec la
partie adverse. Ce sont autant d’occasions de se lier avec l’un ou l’autre de
ses représentants, et de leur faire saisir tout l’intérêt qu’ils peuvent avoir,
à titre personnel, à une réussite des négociations.
A suivre: choisir une stratégie de négociation
[1]
Mais pas seulement. Il fut surtout un visionnaire, imaginant l’Europe de
nations cent cinquante ans avant sa construction. Son talent dans la diplomatie
était au service d’une idée.
[2]
Saint Germain ou la négociation, de
F. Walder
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire
Remarque : Seul un membre de ce blog est autorisé à enregistrer un commentaire.